Les critiques de MG

Nombre de critiques: 178

The Kid*

(The Kid)
The Kid*

Réalisateur: Charlie CHAPLIN

avis:

C'est le premier long-métrage de Charlie Chaplin, et l'on y retrouve les chorégraphies poétiques et la férocité jubilatoire qui ont fait le succès de ses courts-métrages. C'est avec ce film que Chaplin invente son véritable style de funambuliste, vacillant perpétuellement entre le mélodrame larmoyant et la comédie. Malgré une dernière partie onirique quelque peu poussive, le film touche par sa sincérité et sa tendresse, et comprend quelques scènes d'anthologie. C'est sans doute le premier authentique chef d'oeuvre de l'histoire du cinéma.

Date: 1922

Cadet d’eau douce

(Steamboat Bill, Jr.)
Cadet d’eau douce

Réalisateur: Buster KEATON

avis:

Moins célèbre que Le mécano de la Générale, ce film de Buster Keaton est un pur joyau. On y retrouve la structure habituelle des films de Keaton, mais une dimension supplémentaire est donnée grâce à la présence de la figure d'un père. Ce père, bourru et viril, est constamment mis en opposition à son fils aux manières trop délicates. Ce contraste est le ressort comique premier du film, mais donne également une nouvelle profondeur au personnage de Keaton. La scène finale, où le héros doit faire face à un cyclone dévastateur, est un sommet d'humour et d'ingéniosité technique,

Date: 1928

The cameraman*

The cameraman*

Réalisateur: Buster KEATON

avis:

Au-delà de la simple comédie romantique et d'une usine à gags absolument délirante, The cameraman est aussi une métaphore poétique sur le cinéma. C'est à la fois le dernier film de Buster Keaton et son chef d'oeuvre absolu. Il multiplie les prises de vue et les expérimentations visuelles dans une mise en abyme où son personnage, Shannon, est un photographe de l'ancienne école, sorte d'alter-ego de Buster Keaton, lui-même balayé par la naissance du cinéma parlant.

Date: 1929

Un chien andalou*

Un chien andalou*

Réalisateur: Luis BUNUEL

avis:

Un couple se dispute dans un appartement parisien. Autour de ce sujet peu original, le surréaliste Luis Bunuel mêle rêve et réalité et invente des images qui marqueront le cinéma et la culture populaire. On ne comprend pas tout à cette histoire, mais le film suit son propre rythme et distille un certain trouble. C'est un film assez fascinant, car il est tout à la fois expérimental, onirique, mystérieux, mais semble néanmoins suivre un fil narratif qui nous échapperait sans cesse. J’ai vu ce film pour la première fois en classe d’Espagnol, au Lycée, et c’est à peu près la seule chose que je retiendrais de cette discipline.

Date: 1929

Les lumières de la ville*

(City Lights)
Les lumières de la ville*

Réalisateur: Charlie CHAPLIN

avis:

Cette histoire d'amour entre Charlot et une fleuriste aveugle est le film plus sentimental de Charlie Chaplin. Mais si l'ensemble pourrait s'avérer légèrement sirupeux, le cinéaste invente des situations et des gags qui parasitent la romance et donnent au film une dimension tragi-comique. Ce film sur les faux-semblants et les illusions est bouleversant d'humanité et de candeur, et je me souviens encore de mon premier visionnage, avec ma grand-mère au bord des larmes.

Date: 1931

M le maudit

(M – Eine Stadt sucht einen Mörder)
M le maudit

Réalisateur: Fritz LANG

avis:

La force du film de Fritz Lang réside principalement dans les images évocatrices des meurtres perpétrés par Franz Becker, un jeune homme grassouillet, au physique terriblement banal. En choisissant de ne pas montrer les horreurs produites par l'assassin, Fritz Lang invente un style narratif qui marquera l'histoire du cinéma. Le film imprime une marque durable chez le spectateur, grâce notamment à un subtil travail sur le son et à quelques scènes inoubliables.

Date: 1931

King Kong*

King Kong*

Réalisateur: Merian C. Cooper Ernest B. Schoedsack

avis:

Cette variation du thème de la Belle et la Bête est une date importante du cinéma : c'est à la fois le premier grand film de monstre et un jalon dans l'histoire des effets spéciaux. En revoyant le film aujourd'hui, on se rend compte de la qualité des trucages, qui servent un récit où l'émotion domine. La réussite du film tient avant tout dans la transformation du singe : d'abord animal apeuré, fasciné par la beauté de la jeune Ann Darrow, il devient sympathique et préférera se sacrifier plutôt que de blesser sa Belle.

Date: 1933

Soupe au canard

(Duck Soup)
Soupe au canard

Réalisateur: Leo McCAREY

avis:

Dernier film des Marx Brothers qui les réunit au complet (Zeppo quittera ses frères après son dernier rôle de faire-valoir), La soupe au canard est aussi leur film le plus abouti. En 70mn, ce monument du gag parvient à donner le tournis. C'est une mitraillette à gags, un monument d'observation subtile et d'anarchie comique, qui contient quelques scènes d'anthologie qui marqueront l'histoire de la comédie.

Date: 1933

Les 39 marches*

(The 39 Steps)
Les 39 marches*

Réalisateur: Alfred HITCHCOCK

avis:

Quand Alfred Hitchcock réalise Les 39 marches, il a déjà plus de vingt long-métrages à son actif, dont la majorité explorent déjà ses thèmes de prédilection. Mais si Chantage ou Numéro 17 comportaient déjà quelques trouvailles géniales, aucun de ses films antérieurs n'est comparable à l'absolue réussite des 39 marches. C'est le film matriciel de toute son oeuvre, qui contient le ressort principal de ses plus belles réalisations : le personnage de faux coupable, accompagné d'une jeune femme qui lui permettra de s'en sortir. Ce film d'espionnage et d'aventure au rythme soutenu préfigure deux chefs d'oeuvres ultérieurs : Les enchaînés et La mort aux trousses.

Date: 1935

Les temps modernes*

(Modern Times)
Les temps modernes*

Réalisateur: Charlie CHAPLIN

avis:

Malgré l'invention du cinéma parlant, Charlot est de retour pour ce qui sera sa dernière apparition. On y retrouve sa légèreté acide, ici au service d'une dénonciation de l'aliénation des hommes par les machines. Dans quelques scènes spectaculaires, Charlie Chaplin oppose la candeur de son personnage à la pesanteur industrielle. Le film s'achève par une des plus belles fins de toute l'histoire du cinéma. En disant au revoir à son héros, le réalisateur lui donne pour la première fois la parole, mais Charlot débite dans une scène hilarante une sorte de charabia incompréhensible, une sorte d'équivalent sonore des pantomimes de Charlot.

Date: 1936

La grande illusion*

La grande illusion*

Réalisateur: Jean RENOIR

avis:

Si les critiques lui préfèrent souvent La règle du jeu, autre film sur l'illusion, La grande illusion demeure le film le plus populaire et le plus humaniste de Jean Renoir. Les tentatives d'évasion et la chronique de la captivité des héros semble servir le discours du cinéaste : celui d'une humanité qui dépasse les frontières, sociales et géographiques. C'est un film sur l'amitié et la solidarité, bien sûr, mais qui contient sa part de noirceur. Et Jean Gabin, bouleversant, tient là l'un de ses plus grands rôles.

Date: 1937

Monsieur Smith au Sénat*

(Mr. Smith Goes to Washington)
Monsieur Smith au Sénat*

Réalisateur: Frank CAPRA

avis:

Ce n'est sans doute pas le film le plus subtil de Capra, et quelques passages traînent en longueur, mais c'est un pan de la mythologie américaine, et l'un des premiers grands films politiques de l'histoire. A la fois hymne à la gloire de la République et brulôt contre la corruption du système politique, le film est en équilibre permanent et tient essentiellement sur le rôle tout en candeur et en sincérité de James Stewart.

Date: 1939

Ninotchka

Ninotchka

Réalisateur: Ernst LUBITSCH

avis:

La seule présence de Greta Garbo dans son meilleur rôle comique suffirait à rendre ce film incontournable. Mais ce film de Lubitsch est surtout une merveille en terme d'écriture et de rythme. Sous ses atours de film d'espionnage, Ninotchka est avant tout une histoire d'amour qui se déroule dans le Paris des années 20. Lubitsch y ausculte avec acidité les contrastes entre les deux blocs idéologiques qui ne s'affrontent pas encore. Ce n'est pas un brûlot anti-communiste mais une comédie légère qui étudie les travers des deux camps avec une vivacité jubilatoire.

Date: 1939

The shop around the corner

The shop around the corner

Réalisateur: Ernst LUBITSCH

avis:

Autant vous prévenir tout de suite, il n’y aura pas beaucoup de comédies sentimentales dans cette anthologie. Peut-être parce que cette comédie de Lubitsch a défini les codes du genre avec cet imbroglio sentimental à la fois drôle, malicieux et émouvant, et qu’aucun film de ce type n’a ensuite réussi à se hisser à ce niveau d’élégance et de charme. L’histoire semble simple : Alfred Kralik (James Stewart) travaille dans un magasin où la discipline règne. Au même moment, il tombe amoureux d’une mystérieuse correspondante, qui s’avère être la collègue auprès de qui il travaille et qu’il ne supporte pas...

Date: 1940

L’assassin habite au 21*

L’assassin habite au 21*

Réalisateur: Henri-Georges CLOUZOT

avis:

Un assassin commet des meurtres et laisse sur ses victimes sa carte de visite. Cette trame digne d'Agatha Christie offre à Henri-Georges Clouzot la possibilité de déployer tout son univers dans ce premier long-métrage qui préfigure toute son oeuvre. Il y a de l'humour, de la profondeur psychologique, de la cruauté et une galerie de personnages magistrale. C'est un cluedo, c'est une comédie aux dialogues incisifs, ce n'est pas encore un chef d'oeuvre mais c'est totalement jubilatoire.

Date: 1942

Le Corbeau*

Le Corbeau*

Réalisateur: Henri-Georges CLOUZOT

avis:

Dans une petite ville, un mystérieux corbeau multiplie les dénonciations et les soupçons se dirigent vers le docteur Germain (joué par Pierre Fresnay), un homme solitaire qui n’est pas originaire de la ville. Clouzot décrit une France rurale hypocrite et sordide, froussarde et laide. Accusé après guerre d’avoir sali l’image de la France, ce film pessimiste est pourtant une critique à peine cachée de la collaboration.

Date: 1943

Le ciel peut attendre*

(Heaven Can Wait)
Le ciel peut attendre*

Réalisateur: Ernst LUBITSCH

avis:

Cette comédie envoûtante débute par un face-à-face avec le diable. Henry, sorte de Dom Juan contemporain, raconte alors sa vie entièrement dévolue au plaisir et à la séduction. Ernst Lubitsch réalise un authentique chef d'oeuvre, d'une subtilité rare dans l'histoire de la comédie. C'est à la fois doux et léger, cynique et mélancolique, attendrissant et profond.

Date: 1943

Laura*

Laura*

Réalisateur: Otto PREMINGER

avis:

Laura est un film à part, un film unique dans sa construction et sa dimension symbolique. Il fait partie des films vers lesquels je retourne régulièrement, ces films qui n’échappent pas à leur propre mystère, ces films qu’on n’a jamais fini de voir et revoir. Avant tout, Laura est une réflexion sur l’image et les apparences. En utilisant les artifices du film noir (les flash-backs, la voix off, une narration distancée), Otto Preminger donne à son drame psychologique une certaine ambiguïté et une dimension esthétique saisissante. Si la carrière de Preminger se poursuivra par de nombreux autres portraits de femmes, aucun n’atteindra le mystère de Laura.

Date: 1944

La poursuite infernale

(My Darling Clementine)
La poursuite infernale

Réalisateur: John FORD

avis:

Enfant, je regardais avec émerveillement les films de La dernière séance, présentée par Eddy Mitchell. Comme tous les enfants de l'époque, j'adorais les westerns, un genre pourtant moribond dans les années 80. Et puis un jour, comme la quasi totalité de la population mondiale, j'ai cessé d'en regarder. John Ford est sans aucun doute le plus grand réalisateur de westerns de l'histoire du cinéma, déroulant au fil de ses films toute une somme poétique et (parfois) moralisatrice. Je ne sais pas si La poursuite infernale est son meilleur film, mais c'est celui dont les images m'ont le plus marqué. Henry Fonda y incarne à merveille Wyatt Earp, célèbre figure de l'Ouest américain, et John Ford filme les grands espaces comme personne.

Date: 1946

Ève

Ève

Réalisateur: Joseph L. MANKIEWICZ

avis:

Ce film sur la société du spectacle est une satire féroce et un film d'une grande subtilité scénaristique. Construit à partir d'une voix off, de multiples flash-backs et de changements de points de vue, c'est une oeuvre formellement complexe mais d'une diabolique efficacité, digne des meilleurs films noirs. Le film est avant tout un duel entre deux actrices que tout semble opposer : une diva jouée par Bette Davis et une jeune femme qui rêve de devenir actrice (Eve, jouée par Anne Baxter).

Date: 1950

L’inconnu du nord express*

(Strangers on a Train)
L’inconnu du nord express*

Réalisateur: Alfred HITCHCOCK

avis:

Un champion de tennis est abordé dans un train par un inconnu qui lui propose un drôle de marché. Embarqué dans un pacte meurtrier malgré lui, le tennisman candide joué par Farley Granger se retrouve au coeur d'une machination aussi diabolique que perverse. A partir de deux objets d'une extrême banalité (une paire de lunettes, un briquet), Alfred Hitchcock fait monter la tension. Si le scénario de Raymond Chandler semble un peu alambiqué, la mise en scène anxiogène et le montage implacable font de cet engrenage diabolique l'un des grands films noirs de l'histoire du cinéma.

Date: 1951

Chantons sous la pluie

(Singin' in the Rain)
Chantons sous la pluie

Réalisateur: Stanley DONEN

avis:

Malgré une dernière partie plutôt indigeste, ce film est la plus grande comédie musicale de l'histoire. Derrière une intrigue satirique sur la fin du cinéma muet, c'est une véritable farandole de scènes aussi entraînantes qu'esthétiques. La mise en scène est inventive, et on s'enivre avec bonheur de tant d'audace et de poésie. Si les chorégraphies de Gene Kelly sont magnifiques, les intermèdes dialogués parviennent à se hausser au niveau grâce à une écriture précise et acérée.

Date: 1952

L’affaire Cicéron

(Five Fingers)
L’affaire Cicéron

Réalisateur: Joseph L. MANKIEWICZ

avis:

Film méconnu de la carrière de Mankiewicz, L'affaire Cicéron est pourtant une oeuvre d'une grande maturité, aux dialogues brillants, dans laquelle le réalisateur parvient à imposer une vision très personnelle dans un film de genre construit à partir de faits réels. Tout en respectant les codes du film d'espionnage, il intègre en effet quelques grands moments de suspense, faits de silences oppressants et de détails maniaques, dans la lignée des grandes scènes hitchcockiennes. On retrouve dans ce film les thèmes obsessionnels de Mankiewicz déjà aperçus dans Chaînes conjugales et Eve : l'orgueil, le désir et, surtout, la manipulation.

Date: 1952

Él

Él

Réalisateur: Luis BUNUEL

avis:

Ce sommet de l'art si particulier de Bunuel reprend à peu près toutes ses obsessions : sadisme, humour noir et catholicisme. Le film traite d'une jalousie paranoïaque avec une extrême précision.

Date: 1953

Fenêtre sur cour*

(Rear Window)
Fenêtre sur cour*

Réalisateur: Alfred HITCHCOCK

avis:

Grand succès populaire d'Alfred Hitchcock, ce film est paradoxalement son oeuvre la plus expérimentale. C'est un film qui condense tout l'art du réalisateur. Sous le prétexte d'un film à suspense assez lent et empêché (le héros, photo-reporter, est cloué chez lui en chaise roulante), Hitchcock livre également toute une réflexion sur le cinéma comme acte de voyeurisme. Un film simple en apparence (un décor unique, un meurtre) mais qui est habité de multiples significations et symboles.

Date: 1954

Nuages flottants

(浮雲)
Nuages flottants

Réalisateur: Mikio NARUSE

avis:

Cette chronique d'un amour est aussi une réflexion sur le temps qui passe et la passion qui s'étiole. Un mélodrame d'une grande beauté, tout en retenue et en délicatesse.

Date: 1955

Sueurs froides

(Vertigo)
Sueurs froides

Réalisateur: Alfred HITCHCOCK

avis:

C'est sans doute le plus grand film de tous les temps, la matrice de tout un pan du cinéma contemporain. A partir d'une intrigue complexe, sans doute encore moins crédible que celle de L'inconnu du Nord-Express, Alfred Hitchcock s'affranchit des codes du film noir et tisse un scénario vertigineux, fait d'impasses, de faux-semblants et de mises en abyme. Chaque scène semble réinventer la grammaire du cinéma, autour de thématiques chères au réalisateur (la culpabilité, le voyeurisme, le fétichisme). Surtout, c'est le film qui a sans doute le plus marqué toute une génération de cinéastes fascinés par un cinéma noir qui explorerait ses propres confins (Lynch, De Palma, Chabrol, pour faire court).

Date: 1958

Mon oncle*

Mon oncle*

Réalisateur: Jacques TATI

avis:

A la manière d'un Buster Keaton, le personnage de Monsieur Hulot inventé par Jacques Tati est à la fois rêveur et maladroit, et se retrouve confronté à des objets aussi fonctionnels qu'effrayants. Ce troisième long métrage, après Jour de fête et Les vacances de Mr Hulot, est sans doute le film le plus abouti de Jacques Tati. On y retrouve sa poésie désabusée et son délicieux sens de l'absurde, mis au service d'une satire féroce de la société de consommation et de la modernité.

Date: 1958

La soif du mal

(Touch of Evil)
La soif du mal

Réalisateur: Orson WELLES

avis:

Ce film moite et sombre dépeint à merveille l'ambiance d'une ville-frontière. La réalisation d'Orson Welles est brillante, et permet à ce thriller de série B d’accéder au rang de chef d’oeuvre du cinéma. C’est d’abord le portrait d’un flic corrompu (Orson Welles lui-même) et une histoire de perversion et de morale, comme dans tous les films noirs américains. Mais le film dépasse le cadre du cinéma de genre en offrant quelques prouesses virtuoses : plans séquence, effets sonores et visuels assez expérimentaux.

Date: 1958

Pickpocket*

Pickpocket*

Réalisateur: Robert BRESSON

avis:

Des voleurs saisissent des portefeuilles qui circulent de main en main dans un ballet millimétré. Cette chorégraphie virtuose est à l'image de ce film, où Robert Bresson récite sa grammaire de l'image : hors-champs, prises de vue sidérantes et cadrages étonnants. Mais cette esthétique n'a rien de fortuit : elle est le contrepoint de cet anti-héros opaque, exclu de la société, qui fait de son activité de voleur un véritable art.

Date: 1959

La mort aux trousses*

(North by Northwest)
La mort aux trousses*

Réalisateur: Alfred HITCHCOCK

avis:

Cette comédie d'aventure basée sur un simple quiproquo est un plaisir de cinéma à l'état pur. Alfred Hitchcock semble s'amuser avec ce film qui détourne les genres, et il offre au sein de cette comédie pleine de suspense et de rebondissements quelques scènes d'anthologie. La mort aux trousses est à la fois un condensé de toute la carrière du réalisateur, mais aussi un film d'une légèreté étonnante, grâce notamment à un Gary Grant au sommet.

Date: 1959

Bonjour

(お早よう)
Bonjour

Réalisateur: Yasujiro OZU

avis:

Cette comédie est un peu à part dans l'oeuvre du maître japonais. Certes, on y retrouve son génie du cadrage et de la photographie, ainsi que sa capacité à ausculter les petits détails de la vie quotidienne, mais le ton est plus léger que dans ses dernières réalisations. Bonjour relate les aventures de deux jeunes enfants qui entament une grève de la parole pour protester contre une interdiction de leurs parents. La réalisation fantaisiste, les gags enfantins et la critique sous-jacente donnent à ce film libre un charme fou.

Date: 1959

Mirage de la vie

(Imitation of Life)
Mirage de la vie

Réalisateur: Douglas SIRK

avis:

Dans le dernier film de Douglas Sirk on retrouve la quintessence de son cinéma émouvant et totalement en prise avec les questions de la société américaine de l'époque. Inventeur du soap opera avant l'heure, Douglas Sirk multiplie les situations et les retournements inattendus, donnant un aspect très haletant à son mélodrame. Mais la grande réussite de Mirage de la vie tient sans doute aussi à l'utilisation magistrale des couleurs et à la finesse psychologique de ses personnages féminins.

Date: 1959

L’avventura

L’avventura

Réalisateur: Michelangelo ANTONIONI

avis:

A partir d'une simple histoire de disparition, Michelangelo Antonioni crée une brèche dans l'histoire du cinéma. En effet, cette disparition étrange ne sera pas résolue et intéresse finalement assez peu le réalisateur, qui se sert de cette intrigue pour plonger ses personnages dans une forme de détresse. Sa réalisation inventive noue en permanence des liens entre le paysage et les états d’âme des personnages. On se perd dans ce récit mystérieux, où les sentiments amoureux sont à la fois invisibles et terriblement présents. Un film fascinant et presque abstrait sur l'impossible communication entre les êtres.

Date: 1960

Le trou*

Le trou*

Réalisateur: Jacques BECKER

avis:

Accusé d'avoir tenté d'assassiner sa femme, Claude Gaspard est enfermé à la prison de la Santé. Avec ses quatre compagnons de cellule, ils creusent un trou pour tenter de s'évader. En s'éloignant des codes du genre et en étirant les scènes, notamment par une description méthodique et minutieuse des étapes de l'évasion, Jacques Becker parvient à créer une forte tension dramatique. Jacques Becker est mort quelques semaines avant la sortie de ce film inspiré par la vie de son scénariste José Giovanni. Il laisse à la postérité ce film classique formellement, mais réalisé avec une précision d’orfèvre.

Date: 1960

À bout de souffle

À bout de souffle

Réalisateur: Jean-Luc GODARD

avis:

Caméra à l'épaule et cinéma dans l'âme, Godard filme sur tout ce qui bouge. Si le premier film de Godard n'est sans doute pas le plus abouti du réalisateur, c'est un film charnière dans l'histoire du cinéma, imposant son style insolent et en perpétuel mouvement. Le film se présente à la fois comme une parodie de films noirs américains, mais aussi comme un presque-documentaire sur Paris. C'est un road trip, un film porté par un souffle indescriptible, un méta-film, un film d'amour aussi, mais A bout de souffle incarne surtout la quête d'un nouveau cinéma, inventif et libre, totalement désinhibé et débarrassé des carcans du cinéma hollywoodien.

Date: 1960

Psychose*

Psychose*

Réalisateur: Alfred HITCHCOCK

avis:

Cette série B en noir et blanc est devenue un film culte grâce à la célèbre scène de la douche. Mais ce film est assez étonnant dans sa construction même. Psychose débute par l'histoire de Marion Crane (Janet Leigh), une jolie jeune femme qui dérobe une grosse somme d'argent à son patron avant de s'arrêter dans un motel. Chose inédite, cette héroïne typiquement hitchcockienne est rapidement tuée par un psychopathe, et la disparition de la jeune femme crée une césure à l'intérieur du film, en même temps qu'un sentiment de terreur chez le spectateur, englouti par les stridences de la musique de Bernard Herrmann. Au-delà de cette seule scène choc, une des scènes les plus importantes de l'histoire du cinéma, Hitchcock impose au public un nouvel archétype : la figure du serial killer, du monstre ordinaire.

Date: 1960

L’année dernière à Marienbad

L’année dernière à Marienbad

Réalisateur: Alain RESNAIS

avis:

Dans le cadre d'un palace baroque, un homme s'interroge. A partir de cette trame extrêmement mince, Alain Resnais interroge la notion de narration dans le cinéma. Pierre angulaire de la Nouvelle vague, ce film est construit à la manière des romans de Robbe-Grillet, qui signe le scénario. C’est à la fois d’une grande précision stylistique et très fantaisiste, presque onirique. Resnais embarque le spectateur dans un labyrinthe formel et éblouit par son audace et son étrangeté.

Date: 1961

Le goût du saké

(秋刀魚の味)
Le goût du saké

Réalisateur: Yasujiro OZU

avis:

Un père se retrouve seul après le mariage de sa fille. Le dernier film d'Ozu, grâce à de longs plans mélancoliques, dresse le portrait d'un homme face à l'immensité du vide. Mais Le goût du saké est surtout le testament de toute une oeuvre, Ozu n’ayant cessé tout au long de sa vie de traiter de ces questions de mariage et de départ des enfants hors du cocon parental. Filmé à hauteur de tatami, la caméra d’Ozu observe cette société japonaise en pleine transformation, et nous offre son son film le plus abouti.

Date: 1962

Le mépris

Le mépris

Réalisateur: Jean-Luc GODARD

avis:

Le mépris est peut-être le film le plus opaque du Godard première période, mais il est baigné d'une lumière solaire. Ce n'est pas le seul paradoxe de ce film mystérieux, où Godard semble pour la première fois de sa carrière se laisser charmer par les sirènes du succès. En effet, Godard dispose d'un budget conséquent, de stars affirmés (Michel Piccoli et, surtout, la plus belle femme du monde, Brigitte Bardot) et il adapte un roman d'Alberto Moravia. Pourtant, Le mépris est un film complexe, qui semble se dérober continuellement à lui-même : c'est à la fois un hommage au cinéma et un film qui semble précipiter sa fin. Cette histoire d'un couple qui se délite est aussi et surtout une réflexion ironique sur les apparences.

Date: 1963

Les Oiseaux*

(The Birds)
Les Oiseaux*

Réalisateur: Alfred HITCHCOCK

avis:

Ce film ressemble à une histoire d'épouvante traditionnelle, où des êtres maléfiques (ici, de simples oiseaux) prennent peu à peu possession d'une ville. Sur cette trame de série B sans grande envergure, Hitchcock crée une oeuvre étonnante et mystérieuse. Si la magie opère, c'est parce que le réalisateur ne donne jamais les clés de son mystère, et si les effets spéciaux peuvent paraître datés, chaque attaque demeure une épreuve pour le spectateur, notamment grâce à la bande sonore réalisée avec des sons étranges et inquiétants.

Date: 1963

Entre le ciel et l’enfer

(天国と地獄)
Entre le ciel et l’enfer

Réalisateur: Akira KUROSAWA

avis:

Le fils d'un chauffeur est enlevé à la place du fils du directeur d'une importante société. Sur cette idée de départ assez simple, Akira Kurosawa tisse une critique sociale du Japon mais aussi un thriller très efficace. Si le film souffre de certaines longueurs, la réalisation majestueuse de Kurosawa, les nuances psychologiques déployées par Toshirô Mifune et la nervosité de certaines scènes-clés impressionnent.

Date: 1963

Muriel ou le temps d'un retour

Muriel ou le temps d'un retour

Réalisateur: Alain RESNAIS

avis:

Muriel est un film étrange aux significations multiples. Mais c'est avant tout selon moi un film sur le temps. Alain Resnais filme Boulogne-sur-Mer comme un personnage principal, mais il filme aussi la mémoire de cette ville. Les deux êtres qui se croisent dans cette cité reconstruite après-guerre partagent une souffrance, et Resnais crée un langage cinématographique moderne et quelque peu abstrait pour rendre compte de leurs traumatismes.

Date: 1963

Pas de printemps pour Marnie*

(Marnie)
Pas de printemps pour Marnie*

Réalisateur: Alfred HITCHCOCK

avis:

J'ai une tendresse particulière pour ce film bancale, aux ressorts scénaristiques un peu trop prononcés et aux décors en carton pâte. Marnie est un peu une relecture de Vertigo, plus psychanalytique et moins subtile. Mais le héros joué par Sean Connery joue une partition aux multiples variations, et certaines scènes font partie des plus brillantes réalisées par Alfred Hitchcock.

Date: 1964

The servant*

The servant*

Réalisateur: Joseph LOSEY

avis:

Sur un scénario d'Harold Pinter, un face-à-face ambigu entre un valet son maître dans une luxueuse demeure londonienne. Cette confrontation sexuelle et sociale est une variation troublante sur le thème du maître et de l'esclave. La mise en scène de Losey utilise de nombreux reflets et des contre-plongées inquiétantes, et cette profusion d'effets déformants contraste avec le minimalisme des dialogues et la présence de nombreux silences.

Date: 1964

Embrasse-moi idiot

(Kiss Me, Stupid)
Embrasse-moi idiot

Réalisateur: Billy WILDER

avis:

Ou comment écrire une comédie parfaite, légère comme du champagne et néanmoins sulfureuse. Dans ce film méconnu de sa longue carrière, grâce à une mécanique de précision et à un rythme soutenu, Billy Wilder fabrique un marivaudage moderne, qui est surtout une critique acerbe sur la vie de couple.

Date: 1964

Répulsion*

 Répulsion*

Réalisateur: Roman POLANSKI

avis:

Répulsion retrace la descente aux enfers d'une jeune femme schizophrène. Roman Polanski joue avec les contrastes (intérieur/extérieur, réalité/rêve), et introduit des images qui ressemblent à des obsessions surréalistes. Pour la première fois, la splendide Catherine Deneuve joue un rôle sombre et torturé. Si le film n'est pas totalement réussi, il imprime une marque durable sur le spectateur et entame une sorte de cycle que le réalisateur polonais poursuivra avec Rosemary's baby puis Le locataire.

Date: 1965

Le bonheur

Le bonheur

Réalisateur: Agnès VARDA

avis:

Film de contrastes, Le bonheur est un conte noir sur le couple. Le film déploie tous les atours du bonheur, notamment dans l’utilisation de couleurs chaudes et vives, qui s’opposent au récit assez glaçant de cette banale histoire d’adultère. Mais le film est surtout remarquable dans sa mise en scène, à la fois souple et inventive. Agnès Varda décrit le paysage grâce à une multitude de touches impressionnistes, utilisant tous les marqueurs de la nouvelle vague (affiches, mots, musiques...) pour ancrer sa fable dans son temps.

Date: 1965

Masculin Féminin

Masculin Féminin

Réalisateur: Jean-Luc GODARD

avis:

En suivant deux jeunes couples dans le Paris de 1966, Godard porte un regard à la fois tendre et détaché sur une jeunesse tiraillée entre la société de consommation et les idéaux politiques. Ce portrait sociologique évite l'écueil de l'essai pontifiant grâce à une mise en scène inventive et iconoclaste. Bizarrement, ce film fait rarement partie des films cités quand on parle de la carrière de Godard, sans doute parce qu’il se situe entre deux eaux, entre ses films plus politiques (Le petit soldat, La Chinoise) et ses comédies désaxées (La bande des quatre ou Pierrot le fou), ce qui en fait son film le plus sous-estimé.

Date: 1966

Le deuxième souffle*

Le deuxième souffle*

Réalisateur: Jean-Pierre Melville

avis:

Synthèse parfaite de ses polars précédents et premiers pas vers une épure stylistique qui annonce ses derniers films, Le deuxième souffle apparaît comme un film de transition dans la carrière de Jean-Pierre Melville. Son dernier long métrage tourné en noir et blanc est pourtant son film le plus accompli. On y retrouve sa maîtrise du cadre, son art du rythme narratif et une fabuleuse galerie de personnages.

Date: 1966

La Party*

La Party*

Réalisateur: Blake EDWARDS

avis:

Un figurant connu pour sa maladresse est invité par erreur à une réception qu'il transforme malgré lui en catastrophe. Il y  a du Gaston, du Chaplin et du Tati dans ce film peu subtil mais très drôle, au moins dans sa première partie. Du comique de destruction massive.

Date: 1968

2001, l'Odyssée de l'espace*

(2001: A Space Odyssey)
2001, l'Odyssée de l'espace*

Réalisateur: Stanley KUBRICK

avis:

Kubrick livre avec ce film de science-fiction une sorte de somme qui surplombe tout un genre cinématographique et lui donne un nouveau sens. Impossible après cette oeuvre de filmer la science-fiction de la même manière qu'auparavant. Si le récit est assez secondaire, la beauté du spectacle et sa dimension métaphysique impressionnent.

Date: 1968

Il était une fois dans l’Ouest*

(C'era una volta il West)
Il était une fois dans l’Ouest*

Réalisateur: Sergio LEONE

avis:

Ce film a été pensé par Sergio Leone comme la fin du western. C'est aussi une fresque chorale sur l'édification du chemin de fer, à l'origine de la nation américaine. Aidé par deux scénaristes très cinéphiles et très doués (Bertolucci et Argento), Sergio Leone crée une oeuvre ultra-référencée, quasiment entièrement constitué de citations. Néanmoins, grâce à un rythme exagérément lent, à de longs silences et à des gros plans saisissants, le réalisateur parvient à donner une dimension très personnelle à son film, et offre une vision très stylisée et post-moderne du western, un genre traditionnellement assez codifié.

Date: 1968

Le plongeon

(The Swimmer)
Le plongeon

Réalisateur: Frank PERRY

avis:

Ce film avec Burt Lancaster est une fable assez étrange sur la dictature des apparences, la société de consommation et la mort d'une innocence perdue. Le scénario repose sur une idée farfelue : Ned Merrill (Burt Lancaster) décide de rentrer chez lui à la nage en passant par toutes les piscines de son voisinage…C'est un film qui semble évoquer le souvenir d'une vie sexuelle débridée, mais avec la gueule de bois.

Date: 1968

Rosemary’s baby*

Rosemary’s baby*

Réalisateur: Roman POLANSKI

avis:

On retrouve dans ce film d'épouvante deux thèmes majeurs du cinéma de Polanski : la trahison et la folie. Son film est extrêmement bien construit, et la tension du début se transforme peu à peu en pure terreur.

Date: 1968

Faces

Faces

Réalisateur: John CASSAVETES

avis:

Après Shadows, variation jazz qui brisait les règles du cinéma traditionnel, John Cassavetes densifie son cinéma et trouve son style avec Faces. C'est dans ce film que Cassavetes étudie avec le plus d'intensité le visage de ses comédiens. Le film traite principalement de la tension entre ce qu'on est et ce qu'on devient devant les autres. Les personnages de Faces, souvent filmés en gros plan, semblent en effet s'agiter comme des pantins et se forcer à s'amuser. On passe nerveusement de l'hystérie au malaise, du rire au désespoir, grâce notamment à des dialogues subtils.

Date: 1969

Que la bête meure*

Que la bête meure*

Réalisateur: Claude CHABROL

avis:

Un écrivain veut venger la mort de son fils, tué par un chauffard qui a pris la fuite. A partir de cette trame assez simple, Chabrol tisse un face à face digne des meilleurs Hitchcock. La mécanique du thriller fonctionne parfaitement, mais Chabrol instille dans son film une dimension satirique assez savoureuse. Ce faux polar et vrai thriller psychologique est le meilleur film de Claude Chabrol, avec un Jean Yann époustouflant et un scénario d'une précision redoutable.

Date: 1969

Les Damnés*

(La caduta degli dei)
Les Damnés*

Réalisateur: Luchino VISCONTI

avis:

Le cinéma baroque et flamboyant de Visconti trouve avec la barbarie nazie un sujet qui lui permet d'ausculter avec un lyrisme funèbre la déliquescence de la société bourgeoise. Fresque vénéneuse, poisseuse, ce film dense, construit sur la modèle de la tragédie grecque, retrace la trajectoire d'une famille aristocratique en pleine décadence.

Date: 1969

Les chiens de paille*

(Straw Dogs)
Les chiens de paille*

Réalisateur: Sam PECKINPAH

avis:

Film de vengeance, claustrophobique et presque insoutenable, Les chiens de paille demeure une oeuvre controversée car elle défend assez clairement le principe d'autodéfense et semble parfois complaisante dans sa manière de montrer la violence. C’est un film qui a sans doute formé le terreau de tout un cinéma B appelé “vigilante and revenge movie”, dont Charles Bronson sera la première figure tutélaire. Mais Les chiens de paille demeure un huis-clos remarquable, à la mise en scène tendue, électrique, qui joue avec les nerfs du spectateur.

Date: 1971

Deep end

Deep end

Réalisateur: Jerzy SKOLIMOWSKI

avis:

Ce réalisateur polonais, scénariste du premier film de Polanski, réalise avec Deep End son premier film anglais. Ce film étonnant nous plonge dans l'existence d'un jeune garçon de 15 ans, prisonnier de ses désirs sexuels inassouvis. Voyeuriste, d'une grande mélancolie, ce film flotte dans une atmosphère trouble et a les allures d'un conte initiatique.

Date: 1971

Trafic*

Trafic*

Réalisateur: Jacques TATI

avis:

Quand on cite Tati dans ce genre de classement, on retrouve toujours Mon oncle, et parfois Playtime, mais rarement son dernier film, Trafic. En effet, Trafic est un geste de cinéma moins radical que Playtime, et une manière pour Tati de retrouver un succès commercial après l'échec retentissant de Playtime. Voici donc le retour de Mr Hulot en route vers le salon automobile d'Amsterdam. Son comique d'observation et son regard satirique sur la société font merveille dans cette succession de gags très élaborés.

Date: 1971

Cris et Chuchotements

(Viskningar och rop)
Cris et Chuchotements

Réalisateur: Ingmar BERGMAN

avis:

Ingmar Bergman avait déjà fait de la mort le coeur d'un de ses films (Le septième sceau) mais elle était traitée sous forme de parabole. Dans Cris et chuchotements, le réalisateur ose l'affronter de manière plus réaliste. Le travail de mise en scène répond à l'agonie d'une femme, au rythme du retour incessant de la couleur rouge.

Date: 1972

Les larmes amères de Petra von Kant

(Die bitteren Tränen der Petra von Kant)
Les larmes amères de Petra von Kant

Réalisateur: Rainer Werner FASSBINDER

avis:

Petra Von Kant est une célèbre créatrice de mode. Divorcée, Petra habite avec Marlene, styliste et assistante qu'elle se plaît à humilier comme son esclave. Elle s'éprend alors de Karin, une belle jeune femme d'origine plus modeste. On retrouve dans ce film sur l'homosexualité et la domination sexuelle le cinéma kitsch et pervers de Rainer Werner Fassbinder. Sans doute le film le plus intense du réalisateur allemand.

Date: 1972

Mean Streets

Mean Streets

Réalisateur: Martin SCORSESE

avis:

Le film qui révéla avec fracas Martin Scorcese raconte l'histoire de truands au sein de la mafia new-yorkaise. Mean streets repose sur un duo tout en contrastes, entre un Charlie plutôt réfléchi et un Johnny Boy impulsif et insouciant. Ce film étonne par sa liberté de ton, sa joyeuse énergie et le jeu intense de Robert De Niro..

Date: 1973

Une femme sous influence*

(A Woman Under the Influence)
Une femme sous influence*

Réalisateur: John CASSAVETES

avis:

Ce portrait d'une femme au bord de la folie est à la fois un sommet et une fin indépassable dans la carrière de Cassavetes. C'est un film assez âpre, difficilement soutenable, mais très hypnotique. Le style radical du réalisateur est ici porté à son paroxysme : gros plans exagérés, séquences étirées en longueur, atmosphère malsaine et personnages au bord de la rupture. L’égérie de Cassavetes, Gena Rowlands, y joue une femme pleine de vie, bouillonnante de sentiments, qui flirte avec les frontières de la folie. Cassavetes pose sa caméra sur son visage, comme un portraitiste du XVIème siècle, et y scrute toutes les ondulations, du doute au désespoir.

Date: 1974

La balade sauvage

(Badlands)
La balade sauvage

Réalisateur: Terrence MALICK

avis:

Cette odyssée sauvage et violente est aussi magnifique que dérangeante. Martin Sheen crève l'écran avec ce rôle de rebelle constamment à cran. Inspiré par l'histoire de Bonnie and Clyde, ce film est à l'opposé de celui, assez académique, réalisé par Arthur Penn. La balade sauvage est certes un film assez effrayant mais qui produit à chaque scène une fascination étrange, notamment grâce aux contrastes saisissants entre la beauté de la nature et la sauvagerie du couple.

Date: 1974

Vincent, François, Paul… et les autres*

Vincent, François, Paul… et les autres*

Réalisateur: Claude SAUTET

avis:

Ce film d'amitié est selon moi le meilleur de Claude Sautet. C'est la première fois que le réalisateur se débarrasse de toute tentation scénaristique pour se concentrer sur ce qui fait l'essence de son cinéma : le portrait de groupe et une manière de filmer qui semble laisser place à l’improvisation. C'est un film réaliste, qui parvient toujours à conserver un équilibre entre la dynamique du groupe et les tourments intérieurs de ses personnages. A la virtuosité et à l'énergie d'un Cassavetes, duquel il se rapproche, Sautet préfère les silences et les ombres.

Date: 1974

Alice dans les villes

(Alice in den Städten)
Alice dans les villes

Réalisateur: Wim WENDERS

avis:

Ce film d'errance se déploie lentement, à travers une rencontre inattendue entre une jeune fille et un photographe. Un road movie tendre et mélancolique, où Wim Wenders trouve la matière de son cinéma : l'attirance pour l'Amérique, le spleen et la solitude de ses personnages.

Date: 1974

Les Dents de la mer

(Jaws)
Les Dents de la mer

Réalisateur: Steven SPIELBERG

avis:

Evénement à sa sortie en 1975, ce film est à la fois un film d'horreur et une sorte de thriller aquatique. Spielberg fait habilement monter la tension dans toute la première partie du film, jouant avec les silences et la musique angoissante de John Williams pour développer la peur chez le spectateur. Dans la deuxième partie, plus convenue, il s'agit davantage d'un duel entre un trio de marins et le monstre, dans la lignée du roman matriciel de la littérature américaine, Moby Dick.

Date: 1975

Carrie au bal du diable*

(Carrie)
Carrie au bal du diable*

Réalisateur: Brian DE PALMA

avis:

En adaptant le premier roman de Stephen King, Brian De Palma jongle habilement entre teenage movie et film d’horreur. Il s'amuse avec les codes assez convenus d’un genre de film qu’on pourrait appeler “films de campus” en en énumérant toutes les caractéristiques : les couloirs de casiers, le cours de sports, les humiliations, le bal de promo... pour en offrir une critique au vitriol. Mais surtout De Palma n'oublie pas le cinéma et offre dans cette farce macabre une palette complète de ses obsessions : chromatisme pop, split-screens, ralentis et, bien sûr, relecture hitchcockienne à la sauce série B.

Date: 1976

Taxi driver*

Taxi driver*

Réalisateur: Martin SCORSESE

avis:

Vétéran du Vietnam, Travis est un chauffeur de taxi solitaire. Il traîne son spleen morbide dans un New-York nocturne, où il doit affronter la violence urbaine. De Niro est saisissant dans ce rôle d’ange noir. Peu à peu, il impose à cette ville sa mission purificatrice, tandis que Scorsese affirme définitivement son style, entrevu avec Mean streets. Taxi driver est finalement un film assez étrange, car il oscille constamment entre une nervosité urbaine et une sorte de contemplation blafarde.

Date: 1976

Annie Hall*

Annie Hall*

Réalisateur: Woody ALLEN

avis:

C'est avec Annie Hall que Woody Allen trouve son style inimitable. Tournant le dos à la comédie burlesque qui avait fait son succès, Woody Allen se construit un alter-ego névrosé, qui se pose de multiples questions et doute à peu près de tout. Ce personnage permet à Woody Allen de traiter de tous les sujets (le sexe, la religion, la mort) tantôt avec sérieux tantôt avec humour. Les monologues et les dialogues sont merveilleusement écrits et Woody Allen fait preuve d'une liberté de ton inégalée dans le cinéma des années 70. 

Date: 1977

Suspiria

Suspiria

Réalisateur: Dario ARGENTO

avis:

Ce film a tous les attributs du giallo (film italien bas de gamme à tendance horrifique). Mais Dario Argento est un grand réalisateur qui utilise de nombreuses références pour créer son propre langage cinématographique.  Dans une vieille école de danse au décor gothique, des événements étranges se produisent. Si la trame de l'intrigue semble mince, le film impressionne par son impact visuel, son chromatisme baroque et un arsenal d'effets qui rendent certaines scènes presque insupportables.

Date: 1977

L’homme qui aimait les femmes

L’homme qui aimait les femmes

Réalisateur: François TRUFFAUT

avis:

Ce film sur le fétichisme, l'obsession et le désir est sans doute l'un des mieux construits de François Truffaut. Le rythme est donné par de multiples allers et retours entre le présent et le passé, qui servent admirablement le récit. Ce film littéraire, tout en retenue, mi-comédie mi-tragédie, a été perçu comme une autobiographie à peine déguisée de François Truffaut.

Date: 1978

L'Ami américain

L'Ami américain

Réalisateur: Wim WENDERS

avis:

Sur une trame de roman policier, ce film est une étude psychologique assez subtil entre deux hommes qui tissent une drôle d'amitié en organisant un meurtre. Bizarrement, le cinéma d'errance de Wim Wenders se noue parfaitement à cette intrigue de thriller.

Date: 1978

Manhattan*

Manhattan*

Réalisateur: Woody ALLEN

avis:

Si Woody Allen a fait de New-York la ville de son cinéma, l'amour qu'il porte pour sa ville natale atteint un point culminant avec Manhattan, qui commence par une série de cartes postales de la métropole. Woody Allen reprend les motifs dessinés dans Annie Hall, notamment les blagues psychanalytiques et le personnage névrosé d'Isaac, double de Woody Allen. Mais il y a un élément nouveau : c'est cette lumineuse photographie en noir et blanc et les plans larges de Manhattan, qui ont propulsé certaines scènes de cette comédie douce-amère au rang d'icônes contemporaines.

Date: 1979

Buffet froid*

Buffet froid*

Réalisateur: Bertrand BLIER

avis:

Il fut une époque où la France produisait des comédies libertaires au mauvais goût assumé, des films qui ressemblaient un peu à des chansons paillardes. Les valseuses fait partie de cette mouvance, mais il est aussi beaucoup plus que ça. Si le film choque à l'époque c'est davantage en raison de ses personnages de voyous irrévérencieux qui crachent au visage de la bourgeoisie, que des scènes de sexe. Il fut une époque où Bertrand Blier faisait partie de notre panthéon de réalisateurs fétiches, grâce à son sens aigu des dialogues et au ton froid et distant employé dans Buffet froid, son film le plus abouti. Buffet froid n'est sans doute pas le film le plus délicat de cette sélection. Cette fable macabre demeure assez grossière, mais le décor bétonné de La Défense et les couloirs déserts du RER reflètent à merveille l'humour noir de Bertrand Blier, et ce film culte contient quelques morceaux d'anthologie qui ont participé à la création de notre mémoire collective.

Date: 1979

Apocalypse Now

Apocalypse Now

Réalisateur: Francis Ford COPPOLA

avis:

Il y a au moins deux films dans ce film. D'une part, il y a un film sur la guerre du Vietnam, qui commence par un montage psychédélique à partir d'une chanson des Doors (The end). La première partie peut être résumée comme étant une série de rencontres plus ou moins démentes et de scènes de guerre épiques. Mais la deuxième partie, qui commence avec l'apparition de Marlon Brando, est une entrée à l'intérieur du dernier cercle des Enfers. Le film se transforme alors en une sorte de logorrhée pseudo-philosophique assez vaine. Un film fiévreux, nauséeux, qui comporte des scènes inoubliables.

Date: 1979

La drôlesse

La drôlesse

Réalisateur: Jacques DOILLON

avis:

Dans un petit village, un jeune homme simplet enlève une jeune enfant et la séquestre dans son grenier. Une vie bizarre et clandestine s’invente alors entre les deux protagonistes. A partir de ce face-à-face improbable, Doillon filme avec grâce la naissance des sentiments et de la tendresse. Si le sujet est délicat, Doillon maîtrise cette histoire d’amour platonique avec une grande finesse, grâce notamment à la qualité de ses dialogues et à un montage nerveux. Et c’est bouleversant.

Date: 1979

Les chiens

Les chiens

Réalisateur: Alain JESSUA

avis:

Si Alain Jessua est un réalisateur de seconde zone, il a réalisé cette fable d'anticipation aussi glauque que fascinante. L'histoire est simple : devant la montée d'actes malveillants, la bourgeoisie locale d'un village confi dans sa peur s'arme de chiens de défense, dressés par un gourou inquiétant (Gérard Depardieu). Ce pamphlet violent traite du totalitarisme, du racisme, mais aussi du sadisme et des fantasmes sexuels. Un film d'une troublante actualité et un grand film oublié.

Date: 1979

Stalker

Stalker

Réalisateur: Andreï TARKOVSKI

avis:

Dans Stalker, la Zone est une région menaçante dans laquelle seuls les stalkers, des passeurs, osent se rendre. L'un d'eux tente d'amener à l'intérieur de la Zone un physicien et un écrivain. La plupart des films de Tarkovski invitent à la contemplation. Stalker ne déroge pas à la règle : c’est d’abord une oeuvre picturale saisissante, une peinture faite de ruines et de marécages déliquescents. Mais Stalker est aussi un vrai film de science-fiction, mystérieux et angoissant.

Date: 1979

Stardust memories

Stardust memories

Réalisateur: Woody ALLEN

avis:

Ce film époustouflant est une mise en abyme, un autoportrait et une ode au 8 1/2 de Federico Fellini. Mais loin de la truculence boursouflée du cinéma du réalisateur italien, Woody Allen s'amuse et nous amuse avec un cinéma qui joue sur un fil, un cinéma à la fois comique et tragique, construit autour de citations multiples et de névroses obsessionnels. Peut-être le plus grand film de Woody Allen, et assurément l'un de ses plus personnels.

Date: 1980

De la vie des marionnettes

(Aus dem Leben der Marionetten)
De la vie des marionnettes

Réalisateur: Ingmar BERGMAN

avis:

Ce film de Bergman, tourné au départ pour la télévision allemande, est aussi méconnu qu’étonnant. Structuré comme un puzzle, c'est sans doute son film le plus sombre et la seule incursion du réalisateur suédois dans le thriller. Mais ce qui intéresse Bergman c'est d'entrer dans la psyché d'un tueur. A travers un dispositif complexe qui permet de fracturer le temps, on pénètre peu à peu dans la personnalité trouble d'un criminel qui a violé et tué une prostituée.

Date: 1980

Shining*

Shining*

Réalisateur: Stanley KUBRICK

avis:

Dans l'atmosphère froide d'un grand hôtel désert, un gardien isolé devient fou et menace sa propre famille. L'angoisse naît surtout de la géométrie des lieux, des travelling sidérants et du jeu diabolique de Jack Nicholson. Stanley Kubrick réussit le pari d'une adaptation d'un sommet du roman d'épouvante et surpasse Stephen King, en donnant à son excellent roman de genre une autre dimension, propulsant cette histoire de folie dans la mythologie contemporaine.

Date: 1980

Blow Out*

Blow Out*

Réalisateur: Brian DE PALMA

avis:

Dès le début, le film assume deux références qui pourraient être écrasantes : Psychose et Blow-up. Si Blow out condense toutes les motifs cinématographiques de Brian De Palma, c'est pourtant son film le plus fluide. Le cinéaste friand de films de genres reprend la trame du film d'Antonioni, en substituant au photographe un preneur de son (John Travolta). Il manipule le spectateur grâce à une virtuosité formelle époustouflante, et crée un film nocturne haletant et obsédant.

Date: 1981

Hôtel des Amériques

Hôtel des Amériques

Réalisateur: André TECHINE

avis:

Hôtel des Amériques est l’histoire d’une rencontre entre deux être inadaptés, deux personnes solitaires, hantées par leur passé. Cette étude précise des tourments de l’amour pourrait sembler quelconque, mais la poésie de Téchiné se déploie tout au long de ce récit splendide. Catherine Deneuve est renversante, Patrick Dewaere joue comme toujours sur un fil, distillant une forme d’inquiétude latente, mais le plus beau personnage est peut-être Biarritz, cette ville de bord de mer peuplée de fantômes.

Date: 1981

La femme d’à côté

La femme d’à côté

Réalisateur: François TRUFFAUT

avis:

Ce film sur un amour destructeur est sans doute le plus sombre de Truffaut. Alternant le chaud et le froid, Truffaut décrit une vie quotidienne emportée par le tourbillon d'une passion adultérine. Visuellement, ce film rompt avec la lourdeur esthétique du Dernier métro. La réalisation est souple et assez minimaliste, et l’utilisation d’une narratrice, elle-même personnage secondaire de cette histoire, permet au film de conserver une distance avec le réel et de s’élever au rang de conte moderne.

Date: 1981

Meurtre dans un jardin anglais*

(The Draughtsman's Contract)
Meurtre dans un jardin anglais*

Réalisateur: Peter GREENAWAY

avis:

A la fin du XVIIème siècle, un peintre reçoit commande d'une série de dessins d'un manoir. Les indices d'un meurtre apparaissent curieusement sur les esquisses réalisées. En découvrant le monde de Peter Greenaway, j’ai eu l’impression de me perdre dans un labyrinthe visuel et intellectuel, où chaque détail semble important, où chaque image pourrait n’être qu’un faux-semblant, une fausse piste entraînant le spectateur vers une nouvelle impasse. Ce jeu à la fois mathématique et pictural est assez fascinant, même si son cinéma kaléidoscopique et lourdement symbolique tournera vite en rond.

Date: 1982

Rusty James

Rusty James

Réalisateur: Francis Ford COPPOLA

avis:

La même année, Francis Ford Coppola signe deux beaux films sur l'adolescence : Outsiders et Rusty James (Rumble fish), qui révèlent de nombreux jeunes comédiens, dont Matt Dillon. Si les deux films sont très réussis, Rusty James a en plus un charme indéfinissable, notamment grâce à l'usage splendide du noir et blanc et à une utilisation de cadrages insolites.

Date: 1983

Dead zone*

Dead zone*

Réalisateur: David CRONENBERG

avis:

Cette adaptation du meilleur roman de Stephen King est le premier chef d'oeuvre réalisé par David Cronenberg. A la suite d'un accident, un jeune professeur (joué par Christopher Walken) se réveille après plusieurs années de coma. Au bout de quelques temps, il s'aperçoit qu'il possède désormais un don : celui de voir l'avenir sous la forme de flashs saisissants. Ce film commence comme un drame intimiste et se poursuit par une méditation métaphysique sur le bien et le mal.

Date: 1983

A nos amours*

A nos amours*

Réalisateur: Maurice PIALAT

avis:

Tout au long de sa carrière, Maurice Pialat a posé sur la société française un regard plein de franchise et de brutalité. Comme dans son précédent film, Loulou, il oppose un monde bourgeois à l'agonie et une jeunesse turbulente et avide de liberté. Dans ce film qui a fait connaître Sandrine Bonnaire, le réalisateur écorché peint le plus beau portrait de l'adolescence de sa carrière.

Date: 1983

Les nuits de la pleine lune

Les nuits de la pleine lune

Réalisateur: Eric ROHMER

avis:

Ce film magnifique condense tout l'art rohmerien. Sur le thème habituel du choix, Eric Rohmer crée une oeuvre qui est à la fois symbolique de son cinéma et qui se lit comme une photographie de son époque. Les dialogues remarquables, la bande-son moderne et synthétique, le titre qui ressemble à un haïku et résonne avec de nombreuses scènes poétiques font de cette variation sur le doute et l'indécision un authentique chef d'oeuvre.

Date: 1984

Element of crime

Element of crime

Réalisateur: Lars VON TRIER

avis:

Ce film débute comme un film policier, mais dévie rapidement vers une sorte de délire visuel absolument fascinant. On ne comprend pas grand-chose au scénario alambiqué, mais on peut s'émerveiller de cette mise en scène virtuose.

Date: 1984

Down by law

Down by law

Réalisateur: Jim JARMUSH

avis:

C'est avec son second long-métrage que Jim Jarmush impose son cinéma de l'errance, qui ressemble souvent à une improvisation de free-jazz. Ce film en noir et blanc (sublime) est d'abord une histoire de rencontres. Il ne se passe pas grand-chose, comme souvent chez Jarmush, et les longues prises se multiplient, donnant épaisseur et complexité à ces personnages terriblement attachants.

Date: 1986

Blue Velvet*

Blue Velvet*

Réalisateur: David LYNCH

avis:

Aorès une adaptation ratée de Dune, c'est avec son quatrième long-métrage que David Lynch trouve définitivement son style, une voie médiane entre cinéma expérimental et récit candide. Le cinéaste déploie dans Blue Velvet tout son génie plastique, mais son récit est traversé de saillies surréalistes permettant de dévoiler les tourments psychologiques de ses personnages.

Date: 1986

Mélo

Mélo

Réalisateur: Alain RESNAIS

avis:

C'est avec Mélo qu'Alain Resnais trouve la marque de fabrique de ces films à venir, ainsi que son trio d’acteurs fétiches (Sabine Azéma, Pierre Arditi, André Dussolier). S'il a toujours cultivé un goût pour l'artifice, en opposition à ses camarades de la Nouvelle Vague qui préféraient le réalisme et les décors naturels, il croise pour la première fois de manière aussi franche le théâtre et le cinéma. Mélo est un véritable labyrinthe mental, dans lequel Alain Resnais traite de ses sujets de prédilection : le hasard et la destinée.

Date: 1986

Faux-semblants*

(Dead Ringers)
Faux-semblants*

Réalisateur: David CRONENBERG

avis:

Dans ce film, tout est glaçant, du jeu absolument sidérant de Jérémy Irons aux instruments chirurgicaux qui ressemblent à des instruments de torture. La rencontre entre la mise en scène clinique de Cronenberg et ce sujet à la lisière du fantastique font de ce film dérangeant une profonde réflexion sur le double.

Date: 1988

Drowning by numbers*

Drowning by numbers*

Réalisateur: Peter GREENAWAY

avis:

Cette généalogie de trois crimes par noyage est une variation délicieuse sur le crime et sur la matière baroque du cinéma de Greenaway. J'ai découvert par hasard le cinéma de Greenaway grâce à ce film mineur, parfois un peu étanche, mais d'une beauté plastique sidérante.

Date: 1988

Big

Big

Réalisateur: Penny MARSHALL

avis:

Cette comédie familiale est une grande réussite du cinéma populaire, et elle a véritablement imposé Tom Hanks comme un acteur majeur. Saisissant parfaitement les gestes et les manières d'un pré-adolescent, il joue le rôle d'un Candide au pays des jouets. A la fois divertissant et perturbant, ce film grand public est en filigrane un conte noir sur l'entrée dans le monde adulte.

Date: 1989

The Killer*

(喋血雙雄 )
The Killer*

Réalisateur: John WOO

avis:

C'est grâce à ce film que le cinéma d'action de Hong-Kong connut le début d'une reconnaissance internationale. The killer met en scène un tueur à gages ayant le sens de l'honneur, joué par la star Chow Yun-Fat. C'est un déluge de cascades chorégraphiées, de mélo appuyé et d'humour froid. Mais ce qui impressionne surtout ce sont les scènes de fusillades, tournées comme des ballets contemporains. Les gestes de Chow Yun-Fat, flingues en mains, seront ensuite reproduits par tout un pan du cinéma américain, nourri à la sauce asiatique (Quentin Tarantino en tête, bien sûr).

Date: 1989

La discrète

La discrète

Réalisateur: Christian VINCENT

avis:

En réalisant ce marivaudage élégant et en consacrant véritablement Fabrice Luchini, Christian Vincent se glisse volontairement dans les pas d’Eric Rohmer. Mais si les films de Rohmer souffrent parfois d’un jeu d’acteurs bancal, cette petite machination théâtrale est portée par le jeu raffiné et malicieux de Luchini, qui transcende le film. Avec cet écrivain pédant et manipulateur, il invente son personnage de dandy romantique et cynique qui se complaît dans ses propres constructions oratoires.

Date: 1990

La double vie de Véronique

La double vie de Véronique

Réalisateur: Krzysztow KIESLOWSKI

avis:

Après une oeuvre en dix fragments pour la télévision intitulée Le Décalogue, qui le fit connaître hors de Pologne, Kieslowski revient avec ce film mystérieux. Sur le thème très littéraire du double, le réalisateur tisse un film qui est la conceptualisation formelle de sa double identité artistique (polonaise et française). Envoûtant et onirique, par moments opaque, La double vie de Véronique est un film au chromatisme affirmé, nappé de jaunes et d’orangés saturés.

Date: 1991

Petits Arrangements avec les morts

Petits Arrangements avec les morts

Réalisateur: Pascale FERRAN

avis:

Petits arrangements avec les morts est d'abord un film sur la mémoire et une réflexion en filigrane sur la mort. Mais c'est aussi un magnifique film sur la plage et sur l'écume des souvenirs. La réalisation est à la fois distanciée et humaine, ce qui donne au film une justesse et une originalité assez rares dans le cinéma français de l'époque.

Date: 1993

Ed Wood

Ed Wood

Réalisateur: Tim BURTON

avis:

En rendant hommage à un réalisateur de films de science-fiction de séries Z, Tim Burton offre un nouveau portrait d'homme à la marge de la société, après Pee Wee, Edward et, dans une certaine mesure, Batman. Mais c'est avant tout un chant d'amour adressé au cinéma. Plastiquement superbe, c'est un film bouleversant.

Date: 1994

Chungking express

(重慶森林)
Chungking express

Réalisateur: Wong KAR-WAI

avis:

C'est par ce film qu'on a découvert Wong Kar-Wai en France. Ce film suit deux récits qui se croisent, mais ce qui impressionne dans le cinéma de Wong Kar-Wai c'est cette atmosphère indescriptible, à la fois pop et mélancolique, faite de néons lumineux, d'images répétitives, de changements de rythmes et de chansons inoubliables.

Date: 1994

Pulp fiction*

Pulp fiction*

Réalisateur: Quentin TARANTINO

avis:

Tarantino invente le polar à la sauce cartoon. Comme Sergio Leone, auquel il se réfère régulièrement, le réalisateur américain remixe les oeuvres des autres, mais en leur donnant une autre dimension. Ultra-référencé mais irrévérencieux, organisé autour d'une construction alambiquée, ce faux polar est servi par des dialogues jubilatoires et des personnages de salauds mémorables. On y retrouve le goût de Tarantino pour les séries B, les films de kung-fu et les films d’action des années 70.

Date: 1994

La Cérémonie*

La Cérémonie*

Réalisateur: Claude CHABROL

avis:

Sophie (Sandrine Bonnaire) est une jeune femme taciturne et mutique. Employée comme domestique dans une maison bourgeoise, elle devient l’amie de Jeanne (Isabelle Huppert), la postière du village. On retrouve dans cette peinture d’une petite société provinciale toute la grammaire chabrolienne, mais jamais un de ces films n’a atteint un tel degré de malaise. C’est sans doute son plus beau portrait de femme, et il est double. Sandrine Bonnaire joue une marginale analphabète et inquiétante, et Isabelle Huppert une rebelle effrontée et amorale.

Date: 1995

La Promesse

La Promesse

Réalisateur: Luc & Jean-Pierre DARDENNE

avis:

Dans la banlieue liégeoise. Roger gagne sa vie en faisant passer des immigrants clandestins et en les exploitant ensuite sur ses chantiers. Son fils Igor abandonne son apprentissage pour seconder son père dans son "affaire". Mais un jour, un drame survient et Igor va devoir choisir entre une promesse faite à un ouvrier et sa loyauté envers son propre père. Le cinéma social et humaniste des frères Dardenne s'impose dès ce premier film d'une grande maturité scénaristique.

Date: 1995

Nelly et Mr Arnaud

Nelly et Mr Arnaud

Réalisateur: Claude SAUTET

avis:

Ce film minimaliste fut le dernier film tourné par Claude Sautet. C'est aussi son film le plus intimiste, et peut-être le plus dérangeant. Le sujet est plutôt classique, puisqu'il s'agit de l'histoire d'une rencontre entre deux êtres que tout semble séparer : sexe, âge, origine sociale. C'est la manière dont évolue cette relation étrange, à la fois affective et empêchée, qui donne toute la saveur à ce film aussi lisse dans son apparence que complexe dans sa psychologie.

Date: 1995

Casino*

Casino*

Réalisateur: Martin SCORCESE

avis:

Dans ce film grandiose, Martin Scorsese use des systèmes narratifs typiques de l'âge d'or hollywoodien : la voix off et le flash-back. C'est donc un récit impressionniste, mais ce qui impressionne le plus c'est sans doute le rythme incroyable conservé tout au long des 3h18 que dure cette splendide plongée dans la ville corrompue de Las Vegas. Sharon Stone est inoubliable, dans ce qui demeure son plus grand rôle. Le plus grand film de Scorsese ?

Date: 1995

Crash*

Crash*

Réalisateur: David CRONENBERG

avis:

Ce roman de 1973 de J.G. Ballard est inadaptable au cinéma, mais Cronenberg l'a fait. Et c'est un drôle d'objet que ce film à l'érotisme sadien, où se joue le ballet des corps et des automobiles. David Cronenberg réalise une oeuvre fiévreuse et glacée, sans véritable progression dramatique mais qui reprend les codes de nombreux films de genre. Un malaise visuel et sonore assez fascinant.

Date: 1996

Mission impossible

Mission impossible

Réalisateur: Brian DE PALMA

avis:

Si Mission Impossible est un film de commande, Brian de Palma réussit à en faire un divertissement parfait ET un film d'auteur. En effet, on retrouve dans cet opus qui ouvre une saga passionnante les obsessions du cinéaste pour la trahison et les fausses pistes. Il déploie aussi quelques idées de mise en scène qui permettent au film de tenir le spectateur en haleine, comme la vue subjective ou le fait de dévoiler l'intrigue dès le début du film. Le film comporte également une scène culte, où Tom Cruise reste suspendu dans les airs, durant laquelle De Palma réutilise les bonnes vieilles méthodes d'Hitchcock en les redéployant dans le cadre d'un film d'action. Peut-être le plus grand film d’action de tous les temps.

Date: 1996

De beaux lendemains

(The Sweet Hereafter)
De beaux lendemains

Réalisateur: Atom EGOYAN

avis:

Le cinéaste canadien Atom Egoyan signe avec ce drame un chef d'oeuvre assez inattendu, loin de la beauté clinquante et froide de son film précédent , Exotica. Filmant l'horizon comme un western, Egoyan filme avec fluidité et précision le traumatisme ultime : la mort d'enfants.

Date: 1997

L'Anguille

L'Anguille

Réalisateur: Shohei IMAMURA

avis:

Yamashita sort de prison après le meurtre de sa femme huit ans auparavant, et ouvre un salon de coiffure. Muré dans le silence, Yamashita évite les relations, préférant se confier à une anguille. Ce film troublant tire sa force d'un mélange des genres : c'est à la fois un thriller psychologique, mais aussi une sorte de farce métaphysique ponctuée de scènes quasi surréalistes. 

Date: 1997

On connaît la chanson*

On connaît la chanson*

Réalisateur: Alain RESNAIS

avis:

Dans la deuxième partie de sa carrière, Alain Resnais a réalisé des films souvent légers. Mais c'est en rencontrant un duo Bacri/Jaoui au sommet qu'il parvient à réaliser le film parfait pour retrouver le sourire. Sur une idée très simple mais qui devient le coeur du film, Resnais crée un film touchant, drôle et très euphorisant. Les acteurs reprennent en play-back des standards de la chanson populaire française pour faire apparaître leurs fêlures et leurs états d'âme. Un film d'une grande douceur.

Date: 1997

Lost Highway

Lost Highway

Réalisateur: David LYNCH

avis:

Cela démarre comme Blue velvet ou Sailor et Lula, c’est-à-dire comme un véritable film noir. Ce grand créateur d’images qu’est David Lynch réutilise l’ensemble des motifs de ce genre cinématographique : la femme à la beauté vénéneuse, un homme poussé au meurtre, la nuit et, surtout, la manipulation. Mais Lynch n’est pas un réalisateur comme les autres, et le film est surtout porté par ses obsessions et par le rythme de cette bande jaune d’autoroute qui défile dans la nuit. Le réalisateur brise son récit en deux, comme un rêve en son milieu. Tout à coup, les personnages se dédoublent et le petit monde horrifique et opaque du réalisateur se met en place, comme dans Twin Peaks. Je ne suis pas certain d’avoir tout compris, mais le film est une grande réussite plastique, qui imprime des images indélébiles sur notre rétine.

Date: 1997

Starship Troopers

Starship Troopers

Réalisateur: Paul VERHOEVEN

avis:

Cette série B de science-fiction bouscule les codes habituels des blockbusters hollywoodiens. C'est un film avant tout politique, un pamphlet acerbe contre l'Amérique de Bush. Dans la même veine que Robocop et Total Recall, cette odyssée de l'espace est son film le plus ample et le plus réussi.

Date: 1997

The big Lebowski*

The big Lebowski*

Réalisateur: Joel COEN

avis:

Devenue une oeuvre culte de la pop culture, cette comédie célèbre la figure des losers et des anti-héros. En mettant en scène les aventures picaresques du Dude, un type d'apparence assez minable, les frères Coen parviennent à créer un personnage qui symbolise l'envers du rêve américain.

Date: 1998

The hole

(洞, Dòng)
The hole

Réalisateur: TSAI MING-LIANG

avis:

Réalisé à l'origine pour une série télévisuelle sur l'an 2000 pensée par Arte, ce film aqueux imagine un monde de silence et de solitude. L'image est balayée par une pluie incessante, mais ce qui frappe c'est surtout la virtuosité de la mise en scène et les petites inventions visuelles qui s'égrainent tout au long de ce récit funeste.

Date: 1998

Virgin suicides

Virgin suicides

Réalisateur: Sofia COPPOLA

avis:

C’est un des plus beaux films sur l’adolescence, un récit construit à rebours qui rejoue tous les clichés du film américain de teenagers. Sofia Coppola trouve avec son premier film le sujet idéal pour son cinéma vaporeux, au temps dilaté. L’histoire commence par la fin : dans une grande villa bourgeoise, cinq soeurs aussi blondes que sublimes mettent fin à leurs jours. Les garçons qui les ont connues racontent leurs souvenirs mêlés de fantasmes et de rêveries. En éclatant le récit et la chronologie, la réalisatrice crée un film scintillant et terriblement mélancolique.

Date: 1999

Eyes wide shut

Eyes wide shut

Réalisateur: Stanley KUBRICK

avis:

Cette chronique du couple et du désir semble a priori bien loin des films monumentaux précédents de Stanley Kubrick. Mais Kubrick réalise un film à la fois intimiste et ample, et crée un film qui semble contenir de nombreux autres films, passés et à venir.

Date: 1999

La vie ne me fait pas peur

La vie ne me fait pas peur

Réalisateur: Noémie LVOVSKY

avis:

Noémie Lvovsky tisse dans ce film très intime une histoire d'amitié féminine. Centré sur l'adolescence, le film impressionne par sa capacité à conjuguer continuellement deux registres : l'humour et l'émotion. Peu importe le scénario ici, on est emporté par la fougue de la jeunesse, par l'énergie créée par ce groupe de quatre midinettes sauvages. Le film vibre, fonce à toute allure, dérape et brûle d'un feu intérieur, grâce notamment à une mise en scène nerveuse et virevoltante. Un pur moment de bonheur cinématographique.

Date: 1999

Merci pour le chocolat

Merci pour le chocolat

Réalisateur: Claude CHABROL

avis:

Entre 1999 et 2002, Claude Chabrol a sorti trois films majeurs de sa filmographie pléthorique, trois variations hitchcockiennes autour du mensonge et de la culpabilité. Placé entre Au coeur du mensonge et La fleur du mal, Merci pour le chocolat est sans doute le plus remarquable des trois, grâce à la présence menaçante d’Isabelle Huppert. Chabrol s’amuse comme jamais avec cette histoire de meurtre et de manipulation, et offre au spectateur un pur plaisir de cinéma.

Date: 2000

Battle royale*

Battle royale*

Réalisateur: Kinji FUKASAKU

avis:

Cet film est sorti à une époque où la télé-réalité commençait à faire son apparition sur les chaînes de télévision. C'est un réquisitoire implacable contre une société du spectacle sans morale, uniquement tournée vers l'audimat. Le film interroge aussi une certaine déliquescence des valeurs traditionnelles, comme la famille ou la solidarité. Mais c'est surtout un film aux nombreux personnages, dont le principal s'appelle violence.

Date: 2000

Millennium Mambo

Millennium Mambo

Réalisateur: HOU HSIAO-HSIEN

avis:

Ce portrait de jeune femme se déroule au ralenti, comme une dérive dans Taipei. En longues boucles hypnotiques, Hou Hsiao-Hsien explore la vie nocturne urbaine et livre un film très contemporain, à la fois sensoriel et contemplatif. Film de texture et d’ambiance, où les lumières et les sons vibrent à chaque instant avec une rare intensité, Millenium mambo se déploie en nocturama comme un sortilège.

Date: 2001

Va savoir

Va savoir

Réalisateur: Jacques RIVETTE

avis:

Peut-être moins fou que ses films des années 70, Va savoir conserve le ton d'un cinéaste ludique et épris de liberté, mais il est aussi très précis en terme de narration et de rythme. C'est sans doute le film le plus accessible de Rivette, mais c'est surtout une promenade élégante et savoureuse sous le ciel de Paris. Assez jubilatoire.

Date: 2001

Punch-drunk love

Punch-drunk love

Réalisateur: Paul Thomas ANDERSON

avis:

C'est le film le plus fantaisiste de Paul Thomas Anderson, celui aussi où il se prend le moins au sérieux. Loin de la raideur académique de There will be blood, cette comédie romantique est une succession de scènes burlesques et de scènes beaucoup plus tendres. Une vraie réussite et un film complètement à part dans la filmographie du réalisateur de Magnolia.

Date: 2002

Sweet Sixteen

Sweet Sixteen

Réalisateur: Ken LOACH

avis:

La grande force de Ken Loach est de traiter des problèmes sociaux d'une noirceur presque caricaturale avec une sorte d'énergie positive et un regard toujours empathique sur ses personnages de déclassés. Dans ce film, mon préféré du réalisateur, on suit la trajectoire de Liam, obsédé par une mère absente et dépassée. Entre complexe d'Oedipe et violences familiales, Liam tente vainement de s'en sortir. Il patauge avec une force et une intensité incroyables dans cette famille dévastée. Mais si le constat est amer, la démonstration n'est jamais ni trop didactique ni trop pesante.

Date: 2002

Memories of Murder

(살인의 추억)
Memories of Murder

Réalisateur: BONG JOON-HO

avis:

En rase campagne, un flic observe le cadavre d'une jeune femme. C'est par cette image vue et revue des centaines de fois que commence ce faux-polar et vrai film d'atmosphère. Mais chez le réalisateur coréen tout semble à double ou triple fond, et on glisse continuellement entre vrai thriller, humour décalé et lourdeur bouffonne (et un peu inquiétante). Grâce à sa réalisation souple et aux ruptures continuelles de ton, Bong Joon-ho réalise un film aussi bizarre que poétique.

Date: 2003

Lost in translation*

Lost in translation*

Réalisateur: Sofia COPPOLA

avis:

Avec Lost in translation, Sofia Coppola fait un geste assez radical. C'est un film d'ambiance, construit uniquement sur des silences et cette manière si sensuelle d'accompagner des personnages désoeuvrés. Une comédie romantique mélancolique qui est à ce jour le point culminant de la filmographie de la réalisatrice américaine.

Date: 2003

Old boy*

Old boy*

Réalisateur: PARK CHAN-WOOK

avis:

Old boy est un film dérangeant. Un homme, prisonnier pendant quinze ans sans aucune explication, parvient à s'échapper. Il n'a qu'une idée en tête : se venger. D'une certain sophistication dans la mise en scène de la violence, ce film est étrange car c'est à la fois un véritable film d'action, mais il ressemble parfois à une comédie exubérante et grand-guignolesque. 

Date: 2003

Elephant

Elephant

Réalisateur: Gus VAN SANT

avis:

A partir d'un fait divers sanglant (la tuerie du lycée de Columbine), Gus Van Sant crée une oeuvre planante, poétique, proche d'une toile abstraite. Au-delà de l'aspect visuel assez hypnotisant, il réussit un grand film sur l'adolescence, l'ennui et la violence américaine.

Date: 2003

Rois et reine

Rois et reine

Réalisateur: Arnaud DESPLECHIN

avis:

Il y a deux Arnaud Desplechin : le réalisateur talentueux et subtil de Comment je me suis disputé, et un type qui fanfaronne en se prenant pour Shakespeare et est capable de signer quelques films assez insupportables. Après un film un peu raide et légèrement ampoulé (Esther Kahn), Desplechin signe tout simplement sa plus grande oeuvre avec ce film qui évite une narration linéaire pour construire grâce à des récits parallèles une sorte de puzzle familial.

Date: 2004

Eternal Sunshine of the Spotless Mind

Eternal Sunshine of the Spotless Mind

Réalisateur: Michel GONDRY

avis:

Les films de Michel Gondry sont extrêmement touchants, car ils sont un hommage au cinéma d'avant, aux inventions de Georges Méliès et aux bricolages des pionniers des effets spéciaux. Mais sa rencontre avec Jim Carrey emmène son cinéma dans une autre dimension. Une grande romance qui est aussi une réflexion sur la mémoire.

Date: 2004

Match point*

Match point*

Réalisateur: Woody ALLEN

avis:

Après plusieurs films inaboutis, Woody Allen signe un brillant retour aux affaires en transposant son cinéma en Angleterre et en s'interrogeant sur la notion de hasard. En reprenant ses thèmes de prédilection, mais en les brassant sous une noirceur inédite, Woody Allen se réinvente encore. Match point est à la fois un conte acide et une comédie romantique, une tragédie grecque classique et un chef d’oeuvre de cynisme.

Date: 2005

Wassup rockers

Wassup rockers

Réalisateur: Larry CLARK

avis:

En suivant quelques skateurs à travers les rues de Los Angeles, Larry Clark signe un film à la fois conceptuel et ludique. C'est un film sur le skate, un film sur l'adolescence mais c'est surtout un film d'errance qui arpente les différentes couches de la société californienne.

Date: 2005

Les Amants réguliers

Les Amants réguliers

Réalisateur: Philippe GARREL

avis:

Cette histoire d'amour sur fond de mai 68 est sans doute le plus beau film de Garrel. On retrouve dans cette histoire déchirante la beauté originelle de son noir et blanc et ses dialogues littéraires, mais grâce à une mise en scène fluide ce drame exalté demeure très accessible.

Date: 2005

Volver

Volver

Réalisateur: Pedro ALMODOVAR

avis:

Volver a les apparences d'une comédie assez simple, centrée sur le personnage de Raimunda (Pénélope Cruz, dans un rôle d'une richesse incroyable). Comme toujours chez Almodovar, les intrigues se multiplient et se croisent, et la comédie côtoie toujours le drame. Jamais la virtuosité formelle d'Almodovar n'avait à ce point rencontré la précision du récit.

Date: 2006

Les Infiltrés*

(The Departed)
Les Infiltrés*

Réalisateur: Martin SCORCESE

avis:

Avec ce remake américain d'un thriller hong-kongais (Infernal affairs), Martin Scorsese renoue avec son cinéma nerveux et délaisse le temps d’un film mineur ses fresques pompeuses et ampoulées (Aviator, Gangs of New-York). Plus remarquable encore, le remake est encore meilleur que l'original, notamment grâce au jeu des acteurs et à des plans panoramiques absolument vertigineux.

Date: 2006

Munich

Munich

Réalisateur: Steven SPIELBERG

avis:

Steven Spielberg est un réalisateur à part. Il est en effet l'un des seuls à proposer à la fois un cinéma ouvertement commercial et un cinéma d'auteur. C'est parfois le cas à l'intérieur d'un film, où quelques scènes éclatantes sauvent un produit hollywoodien trop lisse (Jurassic park par exemple). C'est aussi le cas dans sa manière d'alterner blockbusters et films plus intimistes. Dans Munich, Spielberg revient sur l'exécution de onze athlètes israëliens lors des Jeux Olympiques de 1972. Ce film très sombre est à ce jour le seul échec commercial retentissant de l’auteur. 

Date: 2006

Control

Control

Réalisateur: Anton CORJBIN

avis:

La photographie en noir et blanc de ce film est splendide. Le réalisateur d'origine hollandaise Anton Corjbin a d'abord poursuivi une carrière de photographe, avant de réaliser des clips pour Dépêche Mode et Echo & the Bunnymen. Son double amour pour la photo et le rock anglais trouve son accomplissement dans ce film d'une beauté funèbre sur le leader de Joy Division, Ian Curtis. Control est un biopic incroyable, où la musique prend bien sûr une grande place, mais qui est paradoxalement un film qui contient de longues plages de silence blanc.

Date: 2007

Zodiac

Zodiac

Réalisateur: David FINCHER

avis:

Avant Zodiac, Fincher m’avait toujours paru être un cinéaste plus malin que génial, et je trouvais certains de ses films clinquants et plutôt désagréables (Seven, et plus encore l’insupportable Fight club). Avec ce film tiré d’une histoire vraie, le réalisateur obsédé par la violence américaine nous entraîne dans une enquête débutant à la fin des années 60. Construisant son récit autour de trois personnages, Fincher donne du corps à ses protagonistes obnubilés par un serial killer invisible, et nous offre un film assez fascinant.

Date: 2007

Shotgun stories

Shotgun stories

Réalisateur: Jeff NICHOLS

avis:

En dressant le quotidien d'une petite communauté rurale et le récit d'une vendetta familiale, Jeff Nichols explore dans ce premier film tout un pan de l'Amérique, celle des délaissés, des champs à perte de vue et des manufactures à l'abandon.

Date: 2007

Gran Torino

Gran Torino

Réalisateur: Clint EASTWOOD

avis:

Selon moi, c'est tout simplement le meilleur film de Clint Eastwood. En mettant en scène un vétéran de la guerre de Corée raciste et irascible, Clint Eastwood reprend des thèmes qui lui sont chers (le pardon, la rédemption) mais il ne l'a jamais fait avec autant de retenue ni d'épure dans son style.

Date: 2008

La belle personne

La belle personne

Réalisateur: Christophe HONORE

avis:

Ce film a un charme fou et laisse en nous une empreinte profonde. Christophe Honoré adapte "La princesse de Clèves" et transpose cette ronde des sentiments dans un lycée parisien. Les dialogues sont merveilleux, la bande son idéale et les paysages hivernaux distillent une douce mélancolie. Ce n'est sans doute pas le film le plus ambitieux du cinéaste, mais c'est son plus réussi.

Date: 2008

The Dark Knight : Le Chevalier noir

(The Dark Knight)
The Dark Knight : Le Chevalier noir

Réalisateur: Christopher NOLAN

avis:

En réussissant l'opus le plus sombre de la saga la plus sombre des super-héros, Christopher Nolan s'affirme comme le nouveau grand réalisateur hollywoodien. En effet, il est capable de donner un nouveau souffle à une série qui a pourtant connu des belles réussites (notamment le Batman 2, le défi de Tim Burton). Splendide galerie de personnages complexes, The dark knight transcende un genre cinématographique qui commence à gangrener le cinéma hollywoodien, car ce film n’est pas seulement un film de super-héros, mais se lit aussi comme une sorte de western contemporain, une lutte épique entre le Bien et le Mal.

Date: 2008

J’ai tué ma mère

J’ai tué ma mère

Réalisateur: Xavier DOLAN

avis:

Xavier Dolan commence sa carrière avec ce film stupéfiant, rempli d’une colère volcanique. Si sa mise en scène manque encore d'amplitude et de souplesse, les dialogues crus entre cet adolescent homosexuel, avide de liberté, et une mère un peu perdue, sont le moteur narratif du film. C'est direct, parfois brutal, et l'énergie que dégage ce premier film d'un jeune réalisateur de 20 ans est euphorisante.

Date: 2009

The Social Network

The Social Network

Réalisateur: David FINCHER

avis:

Zodiac était un film très convaincant. Mais c’est avec The social network que David Fincher a vaincu mes dernières réticences. Ce film est brillant de bout en bout, et il parvient à rendre cette histoire de geeks sans humanité à la fois accessible et universelle. C’est un biopic d’un nouveau genre, c’est un film de procès, c’est aussi une sorte de huis clos qui enferme ses personnages dans la solitude. Surtout, en prenant comme sujet Mark Zuckerberg, David Fincher prenait le risque de confronter sa mise en scène clinquante au débit ultra-speedé de son personnage principal. Mais loin de toute hystérie, David Fincher réalise un grand film, rapide certes, mais à la fois intelligent et cruel.

Date: 2010

The ghost writer

The ghost writer

Réalisateur: Roman POLANSKI

avis:

Réalisateur phare des années 60 et 70, Roman Polanski a alterné films académiques (Pirates, Oliver Twist ou l’impressionnant mais un peu raide Le pianiste), ratages complets (La neuvième porte) ou semi-complets (Frantic, La jeune fille et la mort). Son dernier grand film ? Peut-être le vénéneux Lunes de fiel en 1992, sorte de série B à la De Palma. C’est donc un retour aussi spectaculaire qu’inattendu que le réalisateur effectue avec ce film hitchcockien, diabolique et terriblement efficace, qui est aussi une profonde réflexion sur la falsification. C’est surtout pour Polanski un moyen de faire un film de pure mise en scène.

Date: 2010

Pater

Pater

Réalisateur: Alain CAVALIER

avis:

Ce film expérimental, véritable ovni dans la production cinématographique française, est un grand film sur le pouvoir politique. Alain Cavalier réalise un tour de force en nous baladant avec ce faux documentaire qui est une vraie fiction, à moins que ce ne soit l'inverse. Comme souvent, Vincent Lindon est génial.

Date: 2011

L'Exercice de l'État

L'Exercice de l'État

Réalisateur: Pierre SCHOELLER

avis:

En filmant la politique au quotidien de manière fiévreuse, comme une course contre la montre, Pierre Schoeller renouvelle le genre du film sur les affres du pouvoir. Le film rend parfaitement compte de la vitesse de la communication et des peurs qui s’embrasent comme des traînées de poudre. Ambitieux, ample, ce film nerveux n’est jamais désincarné car il parvient néanmoins, tout en embrassant les arcanes du pouvoir dans leur ensemble, à rester à hauteur d’homme.

Date: 2011

Melancholia

Melancholia

Réalisateur: Lars VON TRIER

avis:

L’image de cet astre qui se rapproche de la Terre dans une lumière aveuglante hantera longuement vos nuits. Lars Von trier est toujours ce cinéaste agaçant, mais c’est un faiseur d’images hors pair. Son film d’apocalypse diffuse une poésie aussi voluptueuse que funèbre.

Date: 2011

Drive

Drive

Réalisateur: Nicholas WINDING REFN

avis:

Sans doute la meilleure ouverture de la décennie, avec cette mythique course poursuite qui joue sur les ruptures de rythmes. La grande réussite de ce film d’action tient dans les moments de spleen nocturne, magnifiés par une bande son parfaite.

Date: 2011

Moonrise Kingdom*

Moonrise Kingdom*

Réalisateur: Wes ANDERSON

avis:

En redistribuant à chaque fois l’ensemble des motifs de son cinéma de maison de poupée, Wes Anderson donne parfois l’impression de tourner en rond. C’est sans doute le cas avec ce faux film d’aventure, et pourtant tout y fonctionne à merveille : perfection plastique, sens diabolique de la symétrie, décors colorés, personnages attachants et famille dysfonctionnelle, bien sûr. Wes Anderson est un grand conteur de petites histoires et un grand architecte de choses minuscules. Quand il s’amuse ainsi, en mode mineur, son cinéma est aussi palpitant que libérateur.

Date: 2012

La chasse

(Jagten)
La chasse

Réalisateur: Thomas VINTERBERG

avis:

Après le coup de poing que fut Festen à la fin des années 90, Thomas Vinterberg avait déçu. Il revient sur le devant de la scène avec ce film qui explore une nouvelle fois la part sombre d’une communauté. Accusé à tort d’attouchements sexuels sur une petite fille, un homme devient la proie d’une horde de villageois. Un film à la lumière froide sur la bêtise humaine et la rumeur.

Date: 2012

Frances Ha

Frances Ha

Réalisateur: Noah BAUMBACH

avis:

Le portrait d’une jeune fille délurée et décalée dans un New-York sublimé par une photographie en noir et blanc magnifique. Un pur plaisir de cinéma.

Date: 2013

Zero Dark Thirty

Zero Dark Thirty

Réalisateur: Kathryn BIGELOW

avis:

Un récit à la force brute qui réinvente tout simplement le film de guerre. Cette traque au cœur des étendues arides du Moyen-Orient  est d’une rare intensité, car en plus d’être un récit haletant, elle est aussi un moyen de mettre un terme symbolique au traumatisme du 11 septembre.

Date: 2013

Inside Llewyn Davies

Inside Llewyn Davies

Réalisateur: Joel COEN

avis:

Une sorte de conte onirique sur la folk music dans un New-York enneigé : un pur moment de mélancolie et un film en mode mineur qui convient merveilleusement à son sujet.

Date: 2013

Mud : Sur les rives du Mississippi

Mud : Sur les rives du Mississippi

Réalisateur: Jeff NICHOLS

avis:

Peut-être moins dense et moins fort visuellement que son film précédent, le saississant Take shelter, Mud remonte à l’une des sources de la mythologie de l’enfance américaine : les deux héros de Mark Twain Huckleberry Finn et Tom Sawyer. En effet, à travers l’histoire de ces deux garçons livrés à eux-mêmes sur les bords du Mississipi, Jeff Nichols raconte à la fois une histoire d’amour romantique et la face cachée de l’Amérique, celle des pick-ups rouillés, des petits boulots et des délaissés du rêve américain. Un film à la facture plutôt classique, plein d’émotion et d’une grande beauté plastique.

Date: 2013

Only lovers left alive

Only lovers left alive

Réalisateur: Jim JARMUSH

avis:

Un couple de vieux vampires dandys vit reclus dans un appartement peuplé de souvenirs et d'objets anciens, tentant de survivre avec classe en maîtrisant leur instinct animal. Si Jim Jarmush s’attaque au film de vampires, il le fait à sa manière, en grand romantique. Il détourne tous les codes du genre pour réaliser un film complètement à part, à a la fois nostalgique et cool.

Date: 2013

Trois Souvenirs de ma jeunesse

Trois Souvenirs de ma jeunesse

Réalisateur: Arnaud DESPLECHIN

avis:

Arnaud Desplechin reprend le personnage de Paul Dedalus, professeur de philosophie dans Comment je me suis disputé. Le film se présente comme un triptyque autour d'un amour impossible entre Paul et Esther, et tresse au fil des scènes le portrait d'un homme sensible, à la fois touchant et profondément mélancolique.

Date: 2015

Mustang

Mustang

Réalisateur: Deniz Gamze ERGUVEN

avis:

C’est Virgin suicides en Turquie : cinq sœurs animées par un désir de liberté s’opposent à leur famille. Moins éthéré que le chef d’œuvre de Sofia Coppola mais plus politique, un grand film sur l’adolescence et l’émancipation.

Date: 2015

The lobster

The lobster

Réalisateur: Yorgos LANTHIMOS

avis:

Au-delà d'une idée de départ incroyable, ce film gigogne est une réussite totale car il parvient à naviguer entre plusieurs genres avec une fluidité remarquable. On passe ainsi d'une comédie loufoque à une sorte de tragédie antique imprégnée de fantastique.

Date: 2015

It follows

It follows

Réalisateur: David Robert MITCHELL

avis:

En pleine nuit, une jeune fille effrayée s'enfuit de chez elle. Après une simple éllipse, on la retrouve allongée sur la plage, le corps brisé. L'idée du film est géniale : un monstre poursuit une victime désignée tout en demeurant invisible aux autres. Seule la proie peut voir le monstre, et le seul moyen pour la victime de se débarrasser du monstre est de coucher avec quelqu'un pour lui transmettre la malédiction. Vrai film d’horreur, It follows n'en demeure pas moins un grand film d’auteur, splendide et effrayant.

Date: 2015

Ma Loute

Ma Loute

Réalisateur: Bruno DUMONT

avis:

Avec Ma loute, Bruno Dumont reprend un peu l'idée de la comédie policière burlesque qui avait fait la saveur si particulière de sa mini-série P'tit quinquin. C'est complètement déjanté, expérimental et pourtant sans prétention, et Luchini est irrésistiblement agaçant. Un objet fantaisiste, complètement à la marge du cinéma français contemporain.

Date: 2016

L'Avenir

L'Avenir

Réalisateur: Mia HANSEN-LOVE

avis:

Nathalie est professeur de philosophie dans un lycée parisien. Un jour, son mari lui annonce qu'il la quitte. C’est un film tragique sur la fin d’un amour, mais c’est filmé de manière tellement souple que l’amertume baigne dans une sorte de douceur. Ce portrait de femme en lutte (Isabelle Huppert est bien entendu incroyable) est à la fois lumineux et violent.

Date: 2016

Paterson

Paterson

Réalisateur: Jim JARMUSH

avis:

Comme souvent chez Jarmush, il ne se passe pas grand-chose. Un chauffeur de bus, poète amateur, s’accommode tant bien que mal de son quotidien ordinaire. Il arpente les rues de sa ville en passant son temps à avoir la tête ailleurs, toujours en décalage avec le monde qui l’entoure. Ce portrait d’un inadapté, figure chère à Jarmush, est une réussité miraculeuse. Grâce à des petits pas de côté, des décalages à peine perceptibles qui étoffent le récit d’une matière mystérieuse, Jim Jarmush réussit un petit film aussi poétique qu’émouvant.

Date: 2016

Creepy

Creepy

Réalisateur: Kiyoshi KUROSAWA

avis:

Cinéaste prolifique, Kiyoshi Kurosawa sait manier comme personne l’étrangeté. Dans Creepy, son personnage de serial killer est absolument fascinant et compte parmi les plus saisissantes incarnations au cinéma, mélange de laideur et d’expressionnisme raide. Creepy est un film d’une efficacité redoutable : derrière la surface lisse des choses se cachent l’horreur et la perversité la plus diabolique. Réussite totale du film de genre.

Date: 2016

Elle

Elle

Réalisateur: Paul VERHOEVEN

avis:

Avec De Palma, Paul Verhoeven est un autre grand réalisateur de séries B. Il excelle également dans le film de genre. Celui-ci est une vraie réussite : vénéneux, ce faux polar déviant joue sur une palette de sentiments et de sensations contradictoires. Paul Verhoeven trouve en Isabelle Huppert, glaçante, l'actrice idoine pour incarner son cinéma malsain.

Date: 2016

Three Billboards : Les Panneaux de la vengeance

(Three Billboards Outside Ebbing, Missouri)
Three Billboards : Les Panneaux de la vengeance

Réalisateur: Martin McDONAGH

avis:

Un film de vengeance qui lorgne du côté des frères Coen : même sens de l’absurde, même empathie pour des personnages de losers, même manière de pulvériser les genres pour en faire un objet de pur cinéma.

Date: 2017

Get out*

Get out*

Réalisateur: Jordan PEELE

avis:

Une jeune fille blanche décide de présenter son fiancé noir à sa famille, lors d’un week-end à la campagne. Petit à petit, le malaise s’installe. Messes basses, regards torves, sous-entendus étranges : chaque moment semble de plus en plus tendu. Sur fond de racisme, ce film surprenant est un terrifiant film de genre, entre thriller de série B et film d'épouvante.

Date: 2017

Pentagon papers

Pentagon papers

Réalisateur: Steven SPIELBERG

avis:

En 1971, un an avant l'explosion du Watergate, Meryl Streep et Tom Hanks se battent pour révéler un secret d'Etat dans les pages du "Washington Post". En lorgnant du côté des Hommes du Président, Steven Spielberg signe un formidable plaidoyer pour la liberté d’expression et un grand film féministe. Bien sûr, certains pourront reprocher au film d'être trop hollywoodien (Meryl Streep et tom Hanks, quand même !), trop didactique, trop prévisible, mais Spielberg s'en tient au minimum pour servir un sujet passionnant, et j'ai trouvé le film très réussi.

Date: 2017

Une affaire de famille

Une affaire de famille

Réalisateur: Hirozaku KORE-EDA

avis:

Comme Bong Joon-ho, ce cinéaste japonais interroge dans la majorité de ces films le concept de famille, mais de manière sans doute plus subtile et moins clinquante que son homologue coréen. Qu'est-ce qu'une famille, au-delà des simples liens du sang? On comprend rapidement que le voile d'incompréhension qui demeure quant aux liens familiaux entre les personnages de cette famille de brigands est volontaire. Le film est une grande réussite en raison notamment de l'émotion qu'il procure.

Date: 2018

Under the silver lake

Under the silver lake

Réalisateur: David Robert MITCHELL

avis:

Ce film est une plongée délirante et paranoïaque dans la ville de Los Angeles. On retrouve dans ce faux thriller et vrai film d'ambiance les influences de David Lynch et des romans de Bret Easton Ellis. A partir de la disparition d'une jeune femme, le cinéaste surdoué de sa génération tisse un récit ambigu et inquiétant, mais qui contient aussi une bonne dose d'humour tordu. C'est un film sur la jeunesse californienne, le cynisme, mais aussi et surtout un film qui rend hommage au cinéma.

Date: 2018

Parasite*

(Gisaengchung)
Parasite*

Réalisateur: BONG JOON-HO

avis:

Film social, thriller horrifique, film à suspense : Parasite est tout cela à la fois. C'est aussi et surtout une grammaire du cinéma d’une précision et d’une virtuosité diaboliques : les plans à la géométrie soignée sont coupés au couteau, le contraste entre les deux familles est symbolisé par des différences chromatiques et des oppositions fortes (le bas/le haut, le chaud/le frroid...) C’est aussi sans doute la seule limite du film : tout y est tellement surligné que le film peut donner l'impression de se satisfaire de lui-même.

Date: 2019

Alice et le maire

Alice et le maire

Réalisateur: Nicolas PARISER

avis:

Ce face-à-face entre un maire vieillissant et une jeune normalienne philosophe est d'une grande intelligence. Les dialogues brillants, l'humour subtil et la critique en demi-ton du monde politique font de ce film un objet à part. Lucchini trouve dans le rôle de maire de la ville de Lyon un espace de jeu à sa mesure : tour à tour désabusé, brillant, arrogant, cynique, paternaliste, il navigue avec élégance dans cet étrange film.

Date: 2019

La foule

(The crowd)
La foule

Réalisateur: King VIDOR

avis:

Dans la tradition des romans naturalistes américains, ce film suit la trajectoire d'un homme ordinaire, traversé de désirs et d'ambitions, mais qui doit faire face à de multiples vents contraires.<br>La mise en scène de Vidor est brillante : on y retrouve une certaine forme de lyrisme, des surimpressions efficaces et des prises de vue qui rappellent le cinéma expressionniste allemand, mais Vidor utilise ces procédés avec une grande subtilité, sans jamais perdre le fil de son récit.<br>Si le film se termine par un immense rire collectif, c'est pourtant une oeuvre sombre, qui examine avec acidité l'envers du rêve américain.

Date: 1928

L'Homme qui en savait trop

(The Man Who Knew Too Much)
L'Homme qui en savait trop

Réalisateur: Alfred HITCHCOCK

avis:

Ce faux film d'aventure est un sommet parfois sous-estimé de la carrière d'Hitchcock. Réalisé au coeur de son âge d'or, L'homme qui en savait trop se situe dans la même veine que La mort aux trousses. En effet, le film multiplie les fausses pistes et hésite entre plusieurs genres, et la réalisation est à la fois décontractée et tendue durant les scènes à suspense. C'est le film idéal pour faire entrer les jeunes dans le cinéma d'Alfred Hitchcock, avec un James Stewart délicieux.

Date: 1956